Un Hôtel de ville couleur sang et or

Fidèle à ses racines et traditions, la commune souhaite mettre les couleurs sang et or de notre drapeau provençal à l’honneur. Désormais, elles orneront la façade de l’Hôtel de ville lors de grands rendez-vous traditionnels. L’occasion pour nous d’en savoir plus sur l’histoire de notre drapeau régional.

Adopté au cours des années 1920 en Provence comme symbole régional, ce drapeau a pour origine la bannière de l’ancien royaume d’Arles ou de Bourgogne qui fut aussi portée par la première – et seule…- dynastie nationale provençale au Moyen-Age ; les Bosonides. Éteinte en ligne masculine, ses droits sur la Provence ont été transmis par mariage à la Maison de Barcelone, dont sont issus les comtes de Barcelone puis les rois d’Aragon, de Valence et de Sicile. Contestés par la Maison de Toulouse qui revendiquait aussi la Provence par héritage, les comtes de Barcelone-rois d’Aragon et comtes de Provence ont utilisé à leur tour ce drapeau en Provence dès le XIIe siècle afin d’y affirmer leur légitimité. Il est peu à peu devenu leur insigne dynastique er familial et se retrouve donc dans toutes leurs possessions : en Espagne – Catalogne, Aragon, Valence -, mais aussi à Naples et en Sicile… Afin d’ancrer ce drapeau dans leurs principautés espagnoles, une légende a été créée ultérieurement stipulant que ce blason aurait été donné au premier comte de Barcelone à l’époque carolingienne. Le roi franc Charles le Chauve aurait alors trempé ses doigts dans la blessure de ce dernier afin de créer son insigne. C’est de là que provient le nom de « sang et or » donné à ce drapeau. Mais cette origine est d’autant plus fausse que les blasons, alors, n’existaient pas… De manière parallèle, la Provence est de son côté passée par les femmes sous la souveraineté de la Maison d’Anjou, issue des rois de France. C’est de là que vient l’écusson bleu orné d’une fleur de lys et d’un “lambel” -sorte de bâton orné vers le bas de trois dents – ,forme simplifiée des armoiries de cette branche cadette des Capétiens… Il a été créé et adopté au début du règne de Louis XIII comme insigne de la province française.

Le milieu du XIXe siècle est celui de l’éveil des nationalismes et des cultures locales. Ce n’est pas un hasard si c’est le moment où Mistral a fondé le Félibrige, et où l’on a commencé à retrouver et mettre en valeur les liens entre Provence et Catalogne. C’est dans ce contexte qu’il faut remettre l’origine de La Coupo Santo, hymne provençal qui fait allusion à cette histoire. Parachèvement de cette évolution, on choisit comme drapeau provençal le “sang et or” médiéval après la guerre de 1914-1918, alors que sa destinée s’était éloignée de notre région. Mais il est porté ici de façon différente qu’en Catalogne en Aragon ou à Valence. Les quatre rayures rouges sur le drapeau à fond doré y sont horizontales. Cela obéit à la coutume médiévale qui “renversait” ainsi le blason, le long de la hampe de la bannière. Si le « sang et or » était également arboré ainsi dans la Provence au Moyen-Âge, on place aujourd’hui chez nous ces rayures de manière verticale à l’instar du blason proprement dit. Cela crée une différence entre les drapeaux catalan, valencien ou aragonais, et la bannière provençale. Et c’est celui qui flotte aujourd’hui sur la plupart des mairies provençales…

Pour en connaître plus encore sur ce drapeau, l’un des plus anciens d’Europe, et qui a donné aussi naissance au drapeau espagnol, voir mon ouvrage Sang et or : un drapeau européen pour la Provence, publié en 2014 aux éditions du Collectif Provence et de l’Observatoire de la Langue et de la Culture Provençales (Cheval Blanc), où l’on peut se le procurer…

Remi VENTURE

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